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La Vérité est au Milieu. Mais pas trop.

Lundi 11 juillet 2011 à 22:22

Pensées d'autrui

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Si on est trop jeune, on ne juge pas bien, trop vieil de même.
Si on n'y songe pas assez... Si on y songe trop, on s'entête et on s'en coiffe.

Si on considère son ouvrage incontinent après l'avoir fait, on en est encore tout prévenu : si trop longtemps après, on n'y entre plus.

Ainsi les tableaux vus de trop loin et de trop près. Et il n'y a qu'on point indivisible qui soit le véritable lieu, les autres sont trop près , trop loin, trop haut ou trop bas. La perspective l'assigne dans l'art de la peinture. Mais dans la vérité et la morale, qui l'assignera ?

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Deux infinis, milieu.
Quand on lit trop vite ou quand on lit trop doucement, on n'y entend rien.

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Nous ne nous tenons jamais au temps présent. Nous anticipons l'avenir comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours, ou nous rappelons le passé pour l'arrêter comme trop prompt, si imprudents que nous errons dans les temps qui ne sont point nôtres, et ne pensons point au seul qui nous appartient, et si vains que nous songeons à ceux qui ne sont rien, et échappons sans réflexion le seul qui subsiste. C'est que le présent d'ordinaire nous blesse. Nous le cachons à notre vue parce qu'il nous afflige, et s'il nous est agréable nous regrettons de le voir échapper. Nous tâchons de le soutenir par l'avenir et pensons à disposer les choses qui ne sont pas en notre puissance pour un temps où nous n'avons aucune assurance d'arriver.
Que chacun examine ses pensées. Il les trouvera toutes occupées au passé ou à l'avenir. Nous ne pensons presque point au présent, et si nous y pensons, ce n'est que pour en prendre la lumière pour disposer l'avenir. Le présent n'est jamais notre fin. Le passé et le présent sont nos moyens, le seul avenir est notre fin. Ainsi nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre. Et nous disposant toujours à être heureux il est inévitable que nous ne le soyons jamais.




Non, tout ceci n'est pas de moi, bien sûr, mais puisque de telles pensées ont été si bien formulées il y a quatre cent cinquante ans, je tenais à les offrir telles qu'elles étaient alors, même si la syntaxe ardue freinera trop certainement les curiosités les plus légères.

D'autres Fragments des Pensées suivront dans ce blog, peut-être même d'autres citations couragicides mais réflexiogènes.

Samedi 2 juillet 2011 à 21:42

Lamentations


 

 

Selon cette belle mine d’informations plus ou moins informatives qu’est Wikipédia, la publicité, c’est le moyen de promouvoir ce qui ne l’a pas encore été. Promouvoir, selon un quelconque Larousse de poche, c’est :  

 

 

 

 

« 1. Élever à une dignité supérieure. (c'est des drôles, sous la coupole !)

 

2. Favoriser le développement, la diffusion de quelque chose. »


La publicité est donc le seul et unique moyen de faire connaître Somatoline Cosmetic - Amincissant intensif Nuit à la femme d'un quelconque pécore qui aurait fait une folie en achetant la boîte-qui-fait-des-images-de-gens-qui-parlent. Ce produit est une Science (dixit le spot) qui vous fait maigrir comme si vous hébergiez un vers solitaire mincir pour être belle dans le lit tout en dormant. C'est aussi simple que ça : acheter le produit, le consommer, dormir, et ainsi de suite. Ils se sentent quand même obligé d'insister sur l'efficacité de la chose (« ça fonctionne ! ») en nous montrant une dormeuse déjà maigre mince qui aurait, paraît-il, utilisé ladite potion magique afin de pouvoir s'exclamer : « je suis un vrai p'tit bâton ! » et de mourir de sous-nutrition
Si on s’en tient à ça, la publicité et la promotion, c’est foutrement génial.





Doutons donc de cette génialitude l’espace d’un instant et imaginons un côté néfaste à la pub (Oui, moi aussi je trouve l’apocope vulgaire, mais que voulez-vous...).


Imaginons un monde affreusement laid où les pubs pullulent de partout : dans les grandes rues comme dans les petites, sur les autoroutes, au téléphone, à la radio, à la télé, au cinéma, sur internet, dans les magazines, sur les vêtements, sur la nourriture, dans les magasins, à la supérette, au supermarché, à l’hypermarché-grande-surface-centre-sportif, et même à la maison.


Imaginons (c’est horrible, je sais, mais faites un effort) des enfants apparemment innocents qui récitent à longueur de journée des slogans publicitaires en prose pauvre pour les copains, plutôt que du René-Guy Cadou en vers gracieux pour l’école. Je ne demande à personne d’imaginer qu’on eût passé René-Guy à la trappe pour chanter la chanson de la purée Mousline quand c’est l’heure de la récit’ à l’école, ç’en eût été trop.


Imaginons ces mêmes enfants qui, plus vieux, sauraient parfaitement orthographier « Abercrombie & Fitch » en étant incapable de dire si « je pansse, donc je suis » s’écrit vraiment avec un a, et si « Des Cartes » ne s’écrit pas plutôt en en seul mot.


Imaginons, un instant seulement tant la douleur serait grande, que les parents eussent toujours accepté que les enfants se levassent à six heures le samedi matin pour parler anglais avec Dora en attendant que la pub revienne et se couchassent assez tard pour apercevoir le début de la pub Manix avant que maman n’éteigne nerveusement en prétendant qu’il faut aller au lit, maintenant.


Imaginons qu’en écoutant paisiblement une interprétation magnifique des variations Goldberg sur France Musique, le quota-pub coupât net la sixième variation (la plus belle) pour caler les fenêtres Tryba, les bananes de Martinique, Air France, le nouveau single des Enfoirés puis la nouvelle pub de la Banque Postale... Même M. Gould n’aurait pas pensé à quelque chose d’aussi incongru.


Imaginons qu’en faisant l’amour vous ayiez la voix de l’annonceuse SNCF en tête sans vous rendre compte que « Robert » n’a en fait jamais été votre prénom.


Imaginons qu’en ouvrant n’importe quelle page internet, vous ne puissiez pas échapper à une random-pub Bête-Clic, « Vous êtes le 2 043 836 239 ème visiteurs dans ce site de l’Internet ! Ceci n’est pas un blague ! » (Sic), ou autre lingot d’or pur gagné rien qu’en allumant son ordinateur.


Imaginons que quiconque possède un téléphone soit par la plus pure conséquence qui soit, la victime d’« appels masqués » proposant de venir le lendemain même voir si votre chauffe-eau fonctionne correctement ou si votre toit accepterait la pose de panneaux solaires à grands coups de « Bojouw Missié, Jé mé pwésente, jé m’appè’ Mawie-Théwèss » et autres « Bichoulr Midèm, èsse-que fous voudlriez pas parassard palrticiper à notlre cran cheu cateau ? - Heu non.. - Mais ch’est glratouit ! » 



Oui, vous pleurez... C’est insoutenable, vous avez raison. 



Vous préférez certainement voir à l’avenir des panneaux de six mètres sur cinq en groupe de trois sur le bord de l’A87 mentionnant à la fois que les moines belges font la meilleure bière du monde alors que c’est faux et qu’il faut consommer de l’alcool avec modération, ou que les porcs de Justin Bridou sont élevés au grand air, eux, au moins ET qu’on ne doit ni grignoter entre les repas ni manger des cochonneries.

 

Vous préférez largement voir quarante pages de publicités de parfums, de montres, d’assurances ou de voitures dans ce qui est normalement le programme télé.


Vous préférez bien mieux les séances de cinéma rallongées d'un quart d'heure de vingt minutes afin de passer les versions longues des spots publicitaires de la télévision, avec le coût du billet rallongé en conséquence, comme de bien entendu.


Vous préférez que Jacob Delafon fasse des parfums ?


Quoi ? Vous préférez que MOI je paie pour que VOUS ne voyiez pas les bannières de pub sur mon blog ?





En tout cas chez Somatoline Cosmetic, on préfère prendre deux barils d'une maigreur ordinaire.

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